Dans quelle voiture roulerons-nous demain? Serons-nous encore maîtres du déplacement du véhicule ou spectateur? À en croire le législateur, on se dirige vers une conduite de plus en plus assistée, avant de basculer vers la voiture autonome. Nous n’en sommes pas encore là mais, au risque de déresponsabiliser chaque jour davantage les conducteurs et à les éloigner de la conduite, la Commission européenne, soutenue par les gouvernements des pays membres et de nombreuses associations, souhaite multiplier les assistances électroniques à la conduite pour rendre l’automobile si intelligente qu’elle sera capable d’éviter seule les accidents. Dans ce cadre, la direction générale de l’industrie de la Commission européenne vient de publier un rapport dans lequel elle soumet une série de mesures à intégrer dans le prochain règlement relatif à la sécurité des véhicules et des piétons. À la lecture du document, il ne fait plus de doute que l’automobile de demain sera placée sous l’influence de Big Brother.
Vers une surenchère de systèmes électroniques
Après l’ABS et l’ESP déjà de série sur les véhicules neufs, l’appel d’urgence automatique baptisé «e-Call», un système embarqué qui permet de déclencher un appel de détresse à destination des secours, qui deviendra obligatoire en octobre 2017, la Commission européenne souhaite désormais rendre obligatoires des aides à la conduite qui permettront de diminuer un grand nombre de collisions. La plupart de ces équipements sont déjà proposés de série ou en option sur certains véhicules.
Parmi la panoplie des aides électroniques que Bruxelles veut rendre obligatoire, on trouve en premier lieu le freinage d’urgence automatique qui viendra pallier l’inattention du conducteur, focalisé à pianoter sur son smartphone, l’aide au maintien dans la trajectoire et le détecteur de somnolence. Ces deux derniers systèmes ne sont pas superflus lorsque l’on sait que l’endormissement du conducteur est la première cause d’accident mortel sur l’autoroute et que de plus en plus d’automobilistes ont pris la mauvaise habitude de se dispenser du clignotant pour prévenir un changement de file. L’allumage des feux de détresse en cas de freinage d’urgence, l’enregistrement des données du véhicule en cas de collision et le contrôle de la pression des pneumatiques figurent également sur la liste des équipements préconisés par la Commission européenne. Selon une étude du manufacturier Bridgestone, le sous-gonflage des pneumatiques constitue un réel risque d’éclatement. Les pneus détériorés et sous-gonflés provoquent 153 000 accidents en Europe par an. Ils sont directement responsables de 6 % des accidents mortels sur route. Ce chiffre atteint 9 % sur autoroute, avec une pointe à 15 % l’été, où les pneus sont soumis à la surcharge et la chaleur.
La Commission européenne s’intéresse également à la sécurité des piétons. Elle envisage l’introduction de dispositifs de détection des piétons et des cyclistes mais aussi de protection de la tête en cas de choc. Ces systèmes existent déjà. Volvo a été le premier constructeur à installer un airbag pour piétons sur la berline V40 en 2012. Le système fonctionne à l’aide de sept capteurs répartis dans le bouclier avant. Lorsqu’ils détectent un contact physique entre un piéton et la voiture, ils déclenchent, en quelques millisecondes, le déploiement d’un grand coussin gonflable qui, sous la forme d’une grande banane, recouvre un tiers du pare-brise ainsi que les montants de baie et provoque, simultanément, le redressement du capot, selon un angle moins agressif pour le piéton.
Les dispositifs de sécurité que Bruxelles défend ne plaident pas pour la réduction de la masse des véhicules, l’amélioration de leur longévité et auront forcément un impact sur le coût des véhicules. D’autres mesures touchant au civisme, à l’éducation et à la formation des conducteurs et des piétons face aux dangers de la route sont certainement moins coûteux et produiraient à n’en pas douter des résultats tangibles. Mais pour développer ces actions, il faudrait un autre courage politique que celui qui consiste à réprimer.