La 88e édition du Salon de Genève ouvre ce mardi matin aux professionnels, jeudi au grand public, dans une atmosphère particulière. Les automobilistes européens assistent impuissants à la mise à mort du diesel. Depuis le dieselgate, le meilleur ami des conducteurs est devenu une sale bête, gênante et honnie. La semaine dernière, par une décision du tribunal de Leipzig, les villes allemandes peuvent désormais interdire aux vieux diesels de circuler. Dans toute l’Europe, édiles, politiques et associations de tout poil se sont unis dans une sorte de front commun pour rayer le diesel de la carte. En toute impunité et sans discernement. Il n’en fallait pas plus pour attiser les peurs et en détourner ses adeptes. Au risque d’entraîner des comportements irrationnels.
Pourtant, depuis l’entrée en vigueur de la norme Euro 6, jamais les moteurs diesel n’ont été aussi propres. Et, à preuve du contraire, tant que les pouvoirs publics concentreront leurs efforts sur la diminution des gaz à effet de serre, au détriment des polluants, les véhicules diesel conserveront un avantage indéniable. Imposer l’électrique aux automobilistes ne réglera pas la question environnementale. Au lieu d’opposer les technologies entre elles, la sagesse commanderait que de leur mettre à disposition un bouquet de solutions: moteurs à combustion interne, électrique, hydrogène. À Genève, vous ne trouverez donc guère de véhicules électriques mais de nombreuses initiatives attestant que le bon vieux moteur à combustion interne bénéficie encore de marges de progression. La voiture autonome joue aussi la discrétion au sein d’un salon où la mode du SUV n’entame pas le capital séduction de la berline traditionnelle
Au sein du vaste hall courant sur deux niveaux, nombreux sont les constructeurs qui ont révisé leurs classiques. Audi présente ainsi une huitième génération de sa grande routière A6 qui, hormis une longueur contenue à 4,94 mètres, n’a désormais plus grand-chose à envier au vaisseau amiral de la gamme, la limousine A8. On retrouve des moteurs V6 renforcés par une hybridation légère, quatre roues motrices et directrices, une suspension pilotée, une planche de bord multi-écrans, une connectivité et des aides à la conduite évoluées. La nouvelle A6 et son arsenal technologique sont attendus en juin prochain.
De l’aveu de Peugeot, c’est une autre Audi, l’A5 Sportback, qui a servi de modèle pour concevoir la nouvelle 508. En 2018, la familiale sochalienne s’inspire des premiums allemands et prend des allures de coupé. Pierre-Paul Mattéi a supervisé le style élancé de la nouvelle familiale du Lion et, petite révolution, il l’a dotée d’un hayon. «Il fallait qu’elle sorte du lot, que les gens se retournent sur son passage.» À l’intérieur, la deuxième génération de 508 se distingue par le modernisme de sa planche de bord, quatrième interprétation du fameux «i-cockpit». Les moteurs à quatre cylindres qui seront disponibles au lancement, en septembre, couvriront des puissances comprises entre 180 ch et 225 ch en essence, et 130 ch et 180 ch en diesel. Un an plus tard, une version hybride rechargeable complétera l’offre.
Si la berline mise sur un retour en grâce pour défendre ses positions face aux SUV, le break n’est pas en reste, qui combine élégance et praticité. Volvo en apporte la preuve avec un nouveau V60 qui perpétue une longue tradition, tout en rajeunissant passablement la formule. Reprenant la base technique des haut de gamme de la marque, le standing du V60 progresse autant que ses dimensions, avec une longueur portée à 4,76 mètres. Le style intérieur épuré est conforme aux dernières réalisations de la marque suédoise. La palette de motorisations comprendra deux variantes hybrides rechargeables, de 340 ch et 390 ch, qui enrichiront l’offre en fin d’année.
Plus menacées encore que les familiales et les routières par le formidable essor des SUV, les compactes, très prisées en Europe, soignent également les apparences. La nouvelle Classe A qui sera lancée au mois de mai apparaît plus que jamais comme une Mercedes à part entière. Sa carrosserie s’étire pour atteindre 4,42 mètres, tandis que sa face avant mime celle du CLS. Cette montée en gamme se vérifie, à l’intérieur, avec l’adoption d’une large tablette courant sur la planche de bord, trait de style original inauguré par la dernière Classe E. En revanche, les petites motorisations 1.3 turbo essence de 165 ch et 1.5 turbodiesel de 116 ch sont d’origine Renault.
Moins sophistiquée, mais pas moins soignée, la coréenne Kia Ceed, dessinée en Allemagne et assemblée en Slovaquie, aimerait détourner la clientèle de la Golf. Cette proche cousine de la Hyundai i30, conçue spécifiquement pour le marché européen, a plusieurs atouts dans son jeu, notamment un châssis affûté. Kia précise que les premières livraisons interviendront en juin, avec trois moteurs turbo essence de 120 ch, 140 ch et 204 ch, et deux diesels de 115 ch et 136 ch. Le constructeur annonce aussi une version «mild hybrid», autrement dit dotée d’une hybridation légère en 48 volts, sans donner plus de précision.
Tandis que l’hybridation gagne du terrain chez tous les constructeurs, son grand initiateur, Toyota, travaille à en améliorer l’agrément autant que le rendement. À Genève, la marque japonaise présente la troisième génération de sa compacte, Auris qui va bénéficier d’une nouvelle chaîne de traction hybride. Le THS II est un système «full hybrid», comme celui de la Prius, mais il inaugure un 4-cylindres 2 litres à injection directe et une boîte à variation continue dotée d’un rapport fixe dédié au démarrage. Ces innovations permettraient de réduire la consommation, tout en limitant la sensation de patinage à l’accélération. L’Auris 3 restera produite au Royaume-Uni et sera disponible en fin d’année.
Est-ce un retour aux sources? Le Range Rover SV Coupé nous renvoie à l’année 1970 et au premier Range Rover, un véhicule qui avait apporté finesse et élégance au sein de l’univers des 4 × 4. Motorisé par un V8 de 5 litres développant 565 ch, le SV Coupé est capable de taquiner les Porsche à plus de 265 km/h sur les autobahns allemandes. Construit à la main à seulement 999 exemplaires, ce SUV exclusif sera à vous contre un chèque 293 400 €. Avec l’Urus, Lamborghini, filiale du groupe Volkswagen (VW), renoue pour sa part avec le SUV. De 1986 à 1992, la marque avait en effet fabriqué à 300 exemplaires un LM 002 destiné à la clientèle orientale et surnommé «Rambo Lambo». Sculptural et luxueux, l’Urus est doté d’une puissante mécanique. Son capot abrite un V8 bi-turbo de 3 996 cm3 développant 650 chevaux. Il permet à ce véhicule de 2,2 tonnes d’atteindre 305 km/h et de grimper à 100 km/h en 3,6 secondes.
La vogue des SUV se poursuit
Skoda inscrit le Vision X dans la même mouvance stylistique que son Vision C présenté à Genève voilà déjà quatre ans. Ce petit SUV, qui devrait être disponible en version plug-in et électrique, constitue une nouvelle étape dans la reconquête esthétique entamée par Skoda, qui cherche à conférer un peu plus de glamour à ses modèles. Palette de couleurs étendue, planche de bord innovante, le label tchèque compte sur ce SUV pour séduire une nouvelle clientèle.
Lexus aussi élargit également sa gamme de véhicules de loisir avec l’UX, un modèle compact conçu à partir de la Toyota CH-R. Véhicule d’accès à la marque, ce SUV pourrait bien constituer le plus gros volume de vente du constructeur premium japonais. Sa motorisation hybride reprendra les derniers développements du groupe en la matière. Question de statut, la finition de la Lexus UX sera plus raffinée que celle du CH-R. Dans la phase de renouvellement des modèles de la famille X, BMW présente le nouveau X4 basé sur le X3. Ce SUV sportif bénéficie d’un style affirmé et des motorisations affûtées. Quant à Seat, il a décidé de faire de son label Cupra une marque de modèles sportifs. Le premier exercice repose sur l’Ateca.
L’électrique étend sa toile
Dans la course aux véhicules familiaux zéro émission, Jaguar a pris de vitesse ses rivaux allemands. Avec l’i-Pace, la firme anglaise est ainsi la première à contester Tesla sur son terrain, celui de la familiale électrique. Dans le courant de l’année, la marque au félin va commercialiser, à partir de 78 380 euros, ce crossover à peine moins long que le F-Pace (4,68 m) mais doté de l’empattement d’une limousine (2,99 m). Propulsé par deux moteurs électriques de 400 ch (un par essieu), ce véhicule revendique une autonomie de 480 km et une vitesse de pointe bridée à 200 km/h. La réplique viendra d’Audi, qui dévoile, seulement durant les journées presse, une version camouflée du Q8 e-Tron. Ce crossover zéro émission sera lancé fin 2018.
Le Hyundai Kona electric possède, lui, une singulière particularité. Version «zéro émission» du SUV urbain du label coréen (4,18 m de long), il offre une motorisation disponible en deux puissances: 135 ch (99 kW) ou 204 ch (150 kW). La première fait appel à une batterie d’une capacité de 39,2 kWh. L’autonomie revendiquée est de 300 km. Pour la seconde, la capacité de la batterie grimpe à 64 kWh, un chiffre élevé pour un véhicule de cette dimension. Chez Volkswagen, après une citadine, un combi et un SUV électriques, les ingénieurs se sont penchés sur la limousine zéro émission. L’I.D. Vizzion est un concept car de 5,11 m de long animé par deux moteurs électriques délivrant 225 kW (306 ch). Ses accumulateurs de 111 kWh lui procureraient une autonomie de 665 km. Mais pas question de la conduire, car c’est un véhicule autonome. Il ne possède ni volant ni même de commandes visibles! Un «chauffeur digital» s’occupe de tout. Il assure non seulement son pilotage mais prend soin aussi des passagers en fonction de leurs préférences de confort.
Inclassables
Sur le stand Lamborghini, l’Urus prend beaucoup de place. Mais, pour bien montrer qu’elle ne renie pas pour autant ses valeurs, la firme de Sant’Agata Bolognese expose à ses côtés une version découvrable de la très sportive Huracan Performante. Allégé de 35 kg comparé au Spyder standard, cette variante Performante adopte le V10 atmosphérique de 640 ch et l’aérodynamique active du coupé pour signer des performances extraordinaires, tel qu’un 0 à 100 km/h expédié en 3,1 secondes. Mercedes ose une AMG-GT à quatre portes et hayon. Chargée de concurrencer la Porsche Panamera, cette sportive familiale sera animée par des moteurs turbos, V6 ou V8, de 435 à près de 650 ch. Elle trouvera sur son chemin une majestueuse BMW Série 8 Grancoupé dévoilée sous la forme d’une étude. Enfin, le stand Toyota révèle, sous les habits d’une voiture de course, la nouvelle GT Supra dont la plateforme est issue d’une coopération avec la firme munichoise.