L’Audi e-tron possède deux qualités primordiales. Il s’agit tout d’abord un SUV, type de véhicule, qui, à l’exception du Jaguar iPace, brille par son absence au sein des gammes électriques des constructeurs. Ensuite, son esthétique n’est pas discriminante. Elle n’a rien à voir avec le look «baleine à bosse» ou cube à roulette dont la voiture électrique a été longtemps la victime. L‘e-tron possède un élégant design de véhicule «thermique», avec des lignes évoquant celles de son grand frère Q7. Et son châssis spécifique n’est pas dérivé de celui d’un autre engin fonctionnant à l’essence ou au gazole. Début d’une offensive: Audi compte lancer une vingtaine de modèles électrifiés d’ici 2025, dont la moitié devrait être 100% électriques.
700 kg d’accumulateurs
Le SUV est bien adapté à l’électrique. Sa vaste carrosserie permet d’embarquer de puissants accumulateurs. La batterie de l’e-tron affiche une capacité de 95 kWh. À 5 kWh près, la même valeur que celle d’une grande Tesla. Ses dimensions sont respectables: 2, 28 m de long pour 1,63 m de large et 34 centimètres d’épaisseur. Sa masse aussi: 700 kg. Avec un tel lest, le poids de la voiture s’établit à 2, 5 tonnes. Mais ces imposants accumulateurs, noyés dans le plancher, abaissent le centre de gravité.
Cette masse élevée ne se ressent pas au démarrage. La puissance, et surtout le couple, disponibles immédiatement, gomment toute sensation de lourdeur. Sur la route, le poids redevient présent, mais la voiture est assistée par de nombreuses béquilles mécaniques, pneumatiques (suspension) et électroniques. Elles rendent sa tenue de route très sûre, y compris sur de mauvais chemins. La voiture accélère franchement jusqu’à sa vitesse maximale, limitée à 200 km/h. Mais de façon beaucoup moins spectaculaire qu’une Tesla , disposant il est vrai d’une puissance nettement supérieure (jusqu’à 762 ch contre 408 pour l’e-tron).
Cette puissance plus mesurée assure a priori au SUV germanique une meilleure autonomie (plus de 400 km selon le cycle WLTP). Nous n’avons pas roulé jusqu’à l’épuisement de la batterie, mais l’Audi e-tron s’est montrée capable de parcourir plus de 300 km aux allures légales. Comme sur tout véhicule électrique, le silence de fonctionnement est impressionnant, à peine troublé par le bruit de roulement. L’aérodynamique très affûtée (Cx de 0,28) participe à la sérénité de l’atmosphère à l’intérieur de l’habitacle. Elle procurerait, selon, le constructeur, une augmentation du rayon d’action d’une trentaine de kilomètres.
Pyramide inversée
Au volant, on retrouve l’univers Audi, avec la bonne ergonomie des commandes, le fameux «Virtual Cockpit» numérique, ainsi qu’une finition toujours de grande classe. Un coup d’œil par la vitre indique que de petites caméras (en option) se sont substituées aux traditionnels miroirs extérieurs . La rétrovision est assurée par deux écrans placés idéalement en haut de chaque portière. Après un temps d’accoutumance, ce système n’offre que des avantages, améliorant de plus l’aérodynamisme. Les ingénieurs d’Ingolstadt ont énormément travaillé pour optimiser la récupération d’énergie. Le conducteur peut jouer avec des palettes pour ajuster le frein moteur et engranger plus ou moins d’autonomie. Ou encore laisser ce soin à un système très perfectionné qui agit de manière transparente.
L’Audi e-tron est un véhicule réussi, mais son utilisation relance la lancinante question des infrastructures de recharge. La voiture est livrée avec un chargeur de 11 kW, ou de 22 kW en option. Il faut 8 heures et demie pour recharger la batterie avec le premier, 4 heures et demie avec le second. La charge rapide à 150 kW permet de récupérer 80% de l’énergie en 30 minutes. Mais ces bornes haut débit ne pas encore nombreuses, et il faudra attendre 2020 pour en profiter tous spécialement du maillage Ionity, un consortium réunissant Audi, BMW, Mercedes et Ford. À terme, les 400 stations de ce réseau européen de recharge rapide, comportant chacune 6 points de charge, devraient être espacées selon un intervalle de 120 km. Avec l’Audi e-tron, on a une fois de plus le sentiment qu’en matière de véhicule électrique, la charrue a été mise avant les bœufs. L’écosystème électrique fait figure de pyramide inversée dont la pointe repose sur les infrastructures. La mobilité électrique a encore un parfum de pionnier. Ceux qui y souscrivent dès aujourd’hui devront en tenir compte.