Une usine désaffectée, en Italie. À l’intérieur, plus de 100 motos fabriquées par la célèbre Meccanica Verghera Agusta s.p.a. Certainement la plus importante collection de machines de la marque au monde. «J’ai quasiment tous les modèles de série, quelques modèles uniques et des prototypes usine», dit le collectionneur qui cède ces pièces accumulées au fil des ans. Son grand-père possédait, dans les années 1950, un garage à l’enseigne de la marque, et son oncle courait au guidon de petites motos préparées par son frère, le père du collectionneur.
Les motos d’»Ago»
Ces motos sont pour la plupart restées statiques depuis plusieurs décennies, mais elles ont été restaurées, souvent, par des anciens mécaniciens de MV, et sont inscrites au «Registro Storico MV Agusta». Elles seront mises en vente par la maison Artcurial le samedi 9 février dans le cadre de Rétromobile. MV est un nom mythique de la moto. Fondée en 1948 par Domenico Agusta à Verghera, dans la province de Varèse, en Lombardie, la firme s’est couverte de gloire sur les circuits, raflant 17 titres de 1958 à 1974. Ses machines, propulsées par des moteurs à quatre temps, ont été pilotées par les plus grands noms de la compétition. Ceux-ci les ont menées constamment sur les podiums: John Surtees, Mike Hailwood, et surtout Giacomo Agostini, «Ago», l’homme aux plus de 300 victoires, champion du monde en 350 cm3 de 1968 à 1973, et en 500 cm3 de 1966 à 1972 au guidon de MV. Mais l’entreprise lombarde a également produit de très nombreux modèles de série.
Spéculation autour des MV
On en retrouve dans cette vente un échantillonnage presque complet de ces MV destinées au grand public. On remarque notamment l’étonnant taxi fabriqué en 1953 à partir de l’avant d’une MV 125 A de 1949 et propulsé par un moteur de 125 C de 1952. Il servait à faire le tour du «Parco della Certosa» à Pavie (estimation: entre 15 et 25 000 €). Ou encore une 750 S de 1972 ayant appartenu au pilote Arturo Merzario, ce qui fait grimper son estimation entre 100 et 150 000 €. Une même 750 S, également de 1972, mais au moteur «vide» (elle était destinée à être exposée sur des salons), est pour sa part estimée qu’entre 25 et 45 000 €. Mais la spéculation touchant ce modèle pourrait bien faire exploser les prix. «D’une base de négociation à 50 000 € sur les MV de grosses cylindrées, nous sommes passés à 100 000 €», estime Raphaël David dans un entretien publié dans le dernier numéro (1004) de La Vie de la Moto. Face à des difficultés financières récurrentes, la firme a été ballottée entre une multitude d’actionnaires depuis une quinzaine d’années (le malais Proton, mais aussi Harley-Davidson et Daimler, notamment).
«La moto est une forme d’équitation»
Avec cette vente, la moto arrive en force dans les enchères de Rétromobile. «Lorsque vous êtes propriétaire d’une Ferrari Daytona,vous n’êtes pas insensible à une Ducati 750 SS, par exemple. C’est du même ordre», explique Pierre Novikoff, directeur adjoint d’Artcurial et passionné de deux-roues, dans La Vie de la Moto. Pour Sylvain Tesson, «les motos vintage correspondent aux personnes portées sur la nostalgie, des âmes naïves, avec un côté enfantin. Il s‘agit certainement d’une représentation fantasmée d’un monde ancien, un peu littéraire, romantique» (Moto Magazine). L’écrivain-voyageur perçoit beaucoup de points communs entre le cheval et la moto: «Je suis grand amateur de chevaux. La moto est une forme d’équitation. La similitude est évidente, la sémantique est la même: on parle de monture, de selle…».