C’est presque un miracle par les temps qui courent. Alors que nombre de constructeurs renoncent à leurs modèles les plus sportifs pour accélérer la baisse de la moyenne de leurs émissions de CO2, BMW maintient au programme la M3 et sa sœur, prénommée M4 lorsqu’elle prend l’apparence d’un coupé.
Cette sixième génération d’une lignée qui a forgé le mythe du bandeau tricolore (bleu ciel, violet et rouge), signe de ralliement à la division sportive Motorsport, évite même le recours à l’électrification. Les passionnés ne bouderont pas leur plaisir car, en même temps, le modèle M le plus vendu de BMW s’avère plus performant que jamais. Partagé avec les X3 et X4, le six-cylindres en ligne 3 litres biturbo passe désormais le cap symbolique des 500 chevaux pour revendiquer une puissance de 510 ch dans sa variante Compétition, la filiale française ayant renoncé à importer la version de base de 480 ch. C’est respectivement 10 ch et 60 ch de plus que l’exclusive M4 GTS et que le duo M3/M4 précédent.
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Cette évolution ne fait pas dans la dentelle. Les deux familiales sportives M héritent de la calandre verticale étrennée par la nouvelle Série 4. Pour ses débuts sous le badge M, cette face avant, qui a fait couler beaucoup d’encre, s’offre une nouvelle interprétation: plus accolés et dénués d’entourage, les deux naseaux sont dotés de lamelles transversales noires. Une M, c’est aussi une agressivité renforcée à base d’un bouclier largement échancré, de prises d’air dans le capot sculpté en aluminium, de lames aérodynamiques, de quatre tuyères d’échappement d’un diamètre inusité jusqu’ici (100 mm), d’un toit en carbone (toit ouvrant optionnel) et de voies élargies – 34 mm à l’avant et 38 mm à l’arrière. Une extraversion qui transpire encore plus lorsque l’on ose les coloris pimpants du catalogue Individual: jaune, vert pomme, bleu ciel et même un inédit rouge Ferrari.
Reste à choisir la définition de l’intérieur entre les décorations en cuir, carbone ou aluminium et les sièges semi-baquets ou les baquets à coque carbone (+ 3850 €) vivement recommandés pour les escapades en circuit. Dans les deux cas, comme toujours chez BMW, la position de conduite est excellente. Les adeptes des journées de roulage opteront pour le pack Performance M (+ 16.500 €) intégrant aussi les freins en carbone-céramique, les jantes de 19 pouces à l’avant et 20 pouces à l’arrière, l’affichage tête haute couleur, la vitesse maxi portée à 290 km/h et une réduction de poids de 25 kg. Toujours mieux que rien, car la masse a dérivé dans des proportions indécentes. Par rapport à l’ancienne génération, l’embonpoint, qui avoisine les 230 kg, sera porté à près de 300 kg avec la transmission intégrale disponible l’été prochain (+ 3000 € environ) en même temps que le cabriolet M4. Un équipement qui a obligé l’abandon de la boîte à double embrayage DKG au profit d’un modèle automatique à 8 rapports moins rapide, même en activant le plus élevé des trois niveaux de passage à l’aide d’un bouton installé sur le levier.
À bord d’une M à la jante de volant plus épaisse qu’à l’accoutumée, on ne prend pas la route sans savoir à quoi s’en tenir. La multitude de réglages offerts donne le tournis. Alors que le bouton «M Mode» permet de sélectionner trois styles d’affichage, le dernier dédié à la piste éteint l’écran multimédia pour ne pas troubler le conducteur transformé en pilote, l’interrupteur «Setup» donne accès à la fenêtre de paramétrage de la réponse moteur, de la dureté de l’amortissement, de la fermeté de la direction et du mordant des freins. Deux configurations peuvent ainsi être sauvegardées et activées via les boutons rouges M1 et M2 placés sur le volant. Dans tous les cas, le confort est préservé.
Un côté Jekyll and Hyde
Les générations se suivent et la philosophie reste la même. Notre modèle d’essai, une M4, fascine toujours par son côté Jekyll and Hyde. En usage touristique et urbain, sa docilité est parfaite et si on le souhaite, les 510 ch peuvent vous entraîner au triple galop. La vigueur instantanée des accélérations (3,9 secondes pour atteindre les 100 km/h) et des reprises défie le sens commun. Réaccélérer à 120 km/h vous plaque au dossier comme si vous étiez en première. Un registre dont il ne faut pas trop abuser car la consommation s’envole et l’autonomie fond, le réservoir ne dépassant pas 59 litres. Les sensations sont hélas édulcorées, noyées sous un torrent de couple et la linéarité de la poussée. L’essentiel est préservé: la M4 se comporte avec une agilité impressionnante et un train avant qui engage au premier coup de volant. Les pneumatiques Michelin Pilot Sport 4S dotés de quatre bandes de gommes différentes n’y sont pas étrangers. Le manufacturier clermontois a même développé des semi-slicks Cup 2 dotés de capteurs reliés à une application pour ajuster les pressions lors d’un usage intensif sur circuit. Un exercice qui permet d’exploiter le potentiel de la M4 et d’approcher ses limites très reculées. Les ingénieurs M ont facilité l’apprentissage en développant un antipatinage DSC à dix positions. Avec les premières, il n’intervient que de manière douce et progressive, vous donnant l’impression de maîtriser votre sujet en entretenant de légères dérives. Les dernières déconnectant le DSC vous laisseront seul face à vos responsabilités.
Reste à choisir entre la berline M3 à même de faire voyager cinq personnes et leurs bagages dans d’excellentes conditions et le coupé M4 ne pouvant accueillir que deux passagers à l’arrière, de moins de 1,85 m en raison d’une garde au toit moins généreuse mais préservant un grand volume de coffre. Une polyvalence à laquelle la Porsche 911 ne peut toujours pas accéder.
Notre avis
Les ingénieurs de BMW Motorsport maîtrisent manifestement leur sujet, poussant le curseur vers la sportivité sans dégrader l’agrément de berline et la facilité de conduite. Cette polyvalence ne peut occulter une inflation du poids et des tarifs auxquels il faudra ajouter le supermalus de 30.000 euros. Fin 2021, un break Touring viendra renforcer l’attrait de la M3.