La Carrera S n’existe plus. À l’occasion d’une cure de jouvence, la huitième génération de la Porsche 911 lancée en 2019 fait le ménage dans sa gamme. Ne subsistent pour le moment que la Carrera de base et la Carrera GTS, déclinées dans toutes les carrosseries et en 2 ou 4 roues motrices. La GTS introduit, c’est une première pour la référence des voitures de sport, l’hybridation. Avec cette technologie baptisée T-Hybrid profitant largement de l’expérience acquise en endurance et avec la 911 GT3 R Hybrid, la 911 négocie un virage au moins aussi important que l’apparition d’une déclinaison à quatre roues motrices en 1988 ou que le passage au refroidissement à eau en 1998 et l’adoption de la suralimentation en 2015.
Avouons toutefois que l’injection d’une pincée d’électricité pourra constituer une déception car les émissions de CO2 ne baissent pas mais se stabilisent. Conséquence: avec des rejets de 239 g/km, la 911 n’échappe pas au supermalus de 60 000 euros. Deux raisons principales expliquent le choix d’une légère hybridation: l’architecture contrainte de la 911 et la volonté de contenir la prise de poids à moins de 50 kg.
Chez Porsche, la masse reste l’ennemi de la sportivité. C’est ainsi que la GTS ne roule jamais en électrique et sa batterie se recharge (très vite) uniquement en roulant. Il n’empêche: cette conversion a entraîné de profonds changements. Le premier concerne le développement d’un nouveau flat-six de 3,6 litres de cylindrée. Ultracompact, ce bloc de 485 ch se contente d’un seul turbo électrique d’une puissance de 11 kW (15 ch). Le système est complété d’une machine électrique synchrone à aimants permanents logée dans la boîte de vitesses PDK et délivrant 40 kW (54 ch) de puissance et 150 Nm de couple ainsi que d’une batterie de 1,9 kWh placée sous le coffre avant. Avec une puissance cumulée de 541 ch, la GTS se rapproche de la fameuse 911 Turbo (580 ch). De son côté, toujours fidèle au flat-six 3 litres biturbo, la Carrera voit sa puissance progresser de 9 ch à 394 ch.
Selon une tradition chère à la marque, le style évolue en douceur mais il sera impossible de confondre les deux modèles. La GTS se distingue par un bouclier avant doté de dix volets d’air verticaux et actifs fonctionnant avec des diffuseurs adaptatifs et un soubassement caréné, des projecteurs redessinés à quatre points lumineux et une poupe spécifique dotée d’un bandeau lumineux blanc et installant les deux sorties d’échappement au centre du bouclier.
Absence de sièges arrière
Le tour du propriétaire se poursuit à l’intérieur, de plus en plus proche des autres modèles de la gamme Porsche. La 911 se convertit à l’instrumentation entièrement numérique logée sur une dalle ultra-mince de 12,6 pouces. Sept options d’affichage sont disponibles, y compris le Classic avec les cinq cadrans traditionnels de la 911. L’aiguille du compte-tours tourne dans le même sens que celles d’une montre et, ce n’est pas du luxe sur circuit, le compte-tours est orienté comme celui d’une voiture de course avec l’aiguille qui démarre à 5 heures. Mais comme souvent, le diable se niche dans les détails. Le contacteur de démarrage est remplacé par un bouton-poussoir. Plus insolite, le coupé renonce à ses sièges arrière. Certes, ils restent disponibles en option gratuite mais on ne sait pas si leur suppression découle d’une volonté d’optimiser le poids ou d’une absence d’intérêt de la clientèle. Dans ce cas, l’espace généreux (373 litres) pourra être utilisé pour les bagages.
Après avoir étrenné la Carrera, on mesure vraiment la différence avec la GTS. Au volant de la version de base, on retrouve les sensations de la 992. On change de registre avec la GTS. Le turbo électrique gomme quasiment le temps de réponse inhérent à ce type de technologie et la machine électrique fait l’effet d’une main géante qui pousse dans le dos. Les performances n’ont jamais été aussi proches de celles de la sensationnelle Turbo. Trois secondes suffisent pour atteindre le cap des 100 km/h ; 10,5 secondes pour celui des 200 km/h. Les reprises progressent aussi: 1,9 seconde pour passer de 80 à 120 km/h. Avec le six-cylindres à plat 3,6 litres, la sonorité a changé, sans pour autant retrouver celle de la génération 964, comme Porsche le suggère.
Les nostalgiques apprécieront la déflagration à la décélération, malgré la suppression de la soupape de décharge du turbo. Symbole de l’amélioration des performances: sur la boucle nord du circuit du Nürburgring, la GTS a gagné 8,7 secondes par rapport à l’ancien modèle. Cette démonstration de force s’appuie sur la présence de disques de freins surdimensionnés analogues à ceux de la Turbo. Privilégié par les adeptes des journées sur circuit, le dispositif en carbone-céramique est toujours proposé. En plus du mordant, il assure une parfaite résistance à l’échauffement. C’est d’ailleurs sur le circuit Ascari, à Ronda en Espagne, où Porsche nous a conviés que l’on peut approcher, sans retenue, l’écart séparant les deux modèles de 911. Alors la Carrera de base avoue un comportement vivant qui fait vite transpirer, la GTS semble rivée sur des rails. Une efficacité qu’elle doit à son châssis sport surbaissé de 10 mm, à sa suspension active PASM couplée au système de gestion du roulis aux quatre roues directrices de série. Malgré ces dernières, nous avons noté une inertie dans le train avant dans les virages serrés et une tendance nette au sous-virage. Enfin, sur une chaussée dégradée, l’amortissement nous est apparu plus ferme que par le passé.
Notre avis
Alors qu’elle a passé le cap de la soixantaine, la 911 n’a pas pris une ride. Mieux: Porsche semble à chaque fois trouver le petit plus pour la maintenir au goût du jour. Dans l’absolu, la version Carrera suffit amplement. Ses performances sont déjà d’un excellent niveau et elle offre tout ce qui fait l’esprit 911. La GTS fait passer dans un autre univers mais finalement peu exploitable chez nous, à moins d’affoler les compteurs sur circuit. Reste l’objet toujours inimitable, envoûtant et désormais (presque) sans concurrence. Ferry Porsche avait peut-être raison lorsqu’il soutenait que la dernière voiture construite serait une voiture de sport.
Fiche technique
Moteurs: 6-cylindres à plat turbo 3,6 l + 2 moteurs électriques
Puissance: 485 ch (541 ch cumulés)
Couple: 570 Nm (610 Nm cumulés)
Transmission: Propulsion, boîte Auto. double embrayage PDK 8 rapports
Dimensions (L/l/h): 4 553 × 1 852 × 1 306 mm
Coffre: 135 litres (avant)
Poids: 1 670 kg
Performances (0-100 km/h): 3 secondes
Vitesse: 312 km/h
Consommation (mixte UE): 10,5 l/100 km
Émissions CO2: 239 g/km
Prix: 174 900 €