Les automobilistes vont-ils bientôt pouvoir consacrer leur temps de conduite à d’autres occupations? Depuis que les pouvoirs publics et les constructeurs se sont mis en tête de déléguer la conduite à un ordinateur pour réduire drastiquement l’accidentologie, c’est le souhait de nombre de conducteurs. En 2019, des automobilistes interrogés sur la voiture autonome, dans le cadre d’une étude internationale, affirmaient pour près de la moitié d’entre eux (47 %) qu’elle allait permettre de «dormir et se relaxer». La possibilité de «se divertir» arrivait ensuite (40 %), puis «manger et boire» (38 %), et, enfin, «travailler et être productif» (36 %). Nous n’en sommes bien évidemment pas encore là mais le législateur français vient d’ouvrir une brèche dans le Code de la route et la circulation routière régis par la convention de Vienne de 1968 et exigeant toujours un conducteur à bord.
Afin de permettre l’expérimentation sur les routes des véhicules dotés de systèmes de conduite automatisée (niveau 3), la France, une première en Europe, vient de publier un décret modifiant le Code de la route qui célèbre ses 100 ans. Il adapte le régime de responsabilité pénale pour permettre au conducteur de dégager sa responsabilité dès lors que le système de délégation de conduite est activé. En d’autres termes, c’est le constructeur qui devient pénalement responsable en cas d’incident ou d’accident. Le décret précise les modalités d’interaction entre le conducteur et le système, ainsi que les manœuvres d’urgence que le système peut être amené à effectuer automatiquement.
Il ne faut pas se bercer d’illusions. Dormir ou regarder un film au lieu de tenir son volant et de rester maître de son véhicule n’est pas pour demain. Ce décret n’a pour seule vocation que de permettre aux constructeurs de tester leurs systèmes dans la circulation. D’ailleurs, le décret précise que la délégation de conduite ne sera autorisée que sur des parcours et des zones prédéfinis. Elle concerne uniquement le maintien dans la voie en situation d’embouteillage sur autoroute. Le conducteur devra toutefois se tenir «constamment en état et en position de répondre à une demande de reprise en main».
Certains véhicules commercialisés depuis quelques années sont équipés de systèmes permettant de lâcher les mains du volant et de confier leur progression à l’intelligence artificielle, notamment dans les embouteillages ou sur l’autoroute. Des essais menés avec de nombreux véhicules montrent que ces systèmes sont encore déficients et ne fonctionnent vraiment que s’ils sont en mesure de communiquer avec les infrastructures – ce qui n’est pas toujours le cas en raison de l’absence d’entretien de la chaussée – et avec les autres véhicules.